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Un résumé des conclusions du rapporteur de la CAA de Nantes:

La C.J.C.E. a constaté que « la teneur en nitrates des eaux de certains bassins de Bretagne n'était pas conforme aux exigences de la directive du 16 juin 1975… » ; Ce manquement persiste depuis plus de 25 ans. 

Dans un rapport du 7 février 2002, la cour des comptes fait le constat suivant: « Les nitrates proviennent essentiellement des engrais minéraux azotés et des épandages de déjections animales »

CAA Nantes, conclusions rapporteur 3 nov 2009, arrêt du 1er décembre 2009: « Ce sont bien les carences de l’Etat qui ont permis que perdure une activité agricole trop polluante en Bretagne ».
 

A titre d’exemple, l’absence de contrôle de l’exécution des plans d’épandage, dénoncée par la cour des comptes, a contribué directement à l’aggravation de la pollution par les sols (voir développement infra).  

Les magistrats de la Cour administrative d’appel de Nantes, saisis par le ministre de l’écologie d’un recours leur demandant d’annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 octobre 2007 condamnant l’État pour sa responsabilité dans les marées vertes de Bretagne, ont rendu le 1er décembre une décision qui fera date dans le dossier des marées vertes. Une décision particulièrement argumentée, et d’une extrême sévérité pour les préfets des départements bretons et le ministère en charge de l’environnement.

I-

S’agissant de la directive du 19 décembre 1991(n° 91/676/CEE du 12 décembre 1991) relative à la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles, elle comporte un ensemble de mesures dont les objectifs sont échelonnés dans le temps à compter du 19 décembre 1991, date de sa notification aux Etats membres.

Pour résumer, dans une première étape, il appartient aux Etats de se conformer à la directive en délimitant dans un délai de deux ans, (article 3), des "zones vulnérables" définies comme toutes les zones connues sur leur territoire qui alimentent les eaux atteintes par la pollution et celles qui sont susceptibles de l'être. 

Puis, dans un délai de deux ans à compter de la désignation des "zones vulnérables", les Etats doivent établir "des programmes d'action" concernant ces zones, qui doivent être mis en oeuvre dans un délai de quatre ans à partir de leur élaboration. 

      Le décret n° 93-1038 du 27 août 1993 est venu transposer les dispositions de    l’article 3 de la directive, en prévoyant que serait dressé un inventaire des zones vulnérables contribuant à la pollution des eaux par le rejet de nitrates et le CE a jugé que ce décret comportait des prescriptions suffisantes pour assurer, dans sa sphère de compétence, les dispositions de l’article 3 de la directive (CE 10 février 1995 chambre d’agriculture d’Ile-de-France et autres n° 153006 aux tables).

Toutefois, c’est seulement par un arrêté du 14 septembre 1994, donc avec un léger retard de neuf mois, que le préfet coordonnateur du bassin Loire-Bretagne a désigné les zones vulnérables, en y incluant toute la Bretagne. 

      En outre, les programmes d’action prévus par l’article 5 de la directive ont été approuvés avec retard. Les décrets régissant ces programmes d’action datent du 4 mars 1996 et du 10 janvier 2001 et le premier programme d’action est intervenu localement le 22 décembre 1997, pour les Côtes d’Armor, donc après expiration du délai de deux ans suivant la désignation des zones vulnérables ; c’est ce qu’a jugé le TA de Rennes dans un jugement du 2 mai 2001 Société Suez Lyonnaise des Eaux, non frappé d’appel (publié à l’AJDA 2001, p.593, jugeant que la France n’a pas mis en oeuvre, dans les délais qui lui étaient impartis, les programmes d’action", dès lors que ce n’est que par un décret du 4 mars 1996 qu’ont été définis le cadre général et la méthode d’élaboration de ces programmes, l’arrêté destiné à appliquer ce décret dans les Côtes d’Armor n’ayant été signé que le 22 décembre 1997. 

L’Etat a commis une faute en transposant de manière tardive les dispositions de la directive du 19 décembre 1991. 

II-

Les activités d’élevage sont assujetties, selon un régime, soit de déclaration, soit l’autorisation, en fonction de la taille de l’élevage.

 La police des installations classées est une police spéciale qui est confiée au préfet. C’est lui qui est compétent pour autoriser les installations qui présentent des inconvénients pour les intérêts visés à l’article L 511-1 (ces intérêts étant la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publique, l'agriculture, ou encore la protection de la nature) ; il lui incombe de fixer par des prescriptions adéquates les conditions d'installation et d'exploitation jugée indispensablepour la protection des intérêts mentionnés à l'article L 511-1, y compris par des arrêtés complémentaires.

La responsabilité de l’Etat peut, selon la jurisprudence, être engagée en raison des carences dans l’exercice de la police des installations classées et en raison des pouvoirs étendus dont dispose le préfet, cette responsabilité peut être engagée pour faute simple. Voyez par exemple, entre autres :

- Pour le refus illégal du préfet de mettre en demeure un éleveur de porcs de régulariser la situation de son exploitation en déposant une demande d’autorisation, C.E. 15 février 1974 Ministre du développement industriel et scientifique c/ Sieur Arnaud (Rec. p.115),
- Pour le manquement du préfet à son obligation d’assurer le respect des prescriptions de fonctionnement de l’arrêté d’autorisation, C.E. 11 juillet 1986 Ministre de l’environnement c/Michallon (req. n°67719),
- en raison de l’insuffisance des prescriptions de l’arrêté d’autorisation pour protéger le voisinage : C.E.18 décembre 1987 Reulet (req. n°68821), - C.A.A. Paris 21 janvier 1997 Commune de Saint-Chéron (Rec. T. p.951).
- C.E. 5 juillet 2004 Lescure n° 243801 aux tables (AJDA 2005 p.610),Carence en l’espèce dans le cadre de la police des installations.

(approche règlementaire négociée avec la profession agricole)
 
 Ø      Rapport du 7 février 2002, de la Cour des comptes, intitulé « La préservation de la ressource en eau face aux pollutions d’origine agricole : le cas de la Bretagne » 

L’interdiction d’augmenter les effectifs d’animaux en zones d’excédent structurel n’a quasiment jamais été appliquée. Ces zones, définies par un arrêté du 2 novembre 1993 (cf jurisclasseur rural, fasc Nuisances agricoles) sont celles dans lesquelles la charge d’azote est supérieure à 170 kg/ha. En effet, l’interdiction a fait l’objet de dérogations accordées avec souplesse (jeunes agriculteurs et élevages à dimension économique insuffisante).

La cour des comptes dénonce en outre les faiblesses dans l’instruction des demandes d’autorisation : études d’impact insuffisantes et avis presque toujours favorable du comité départemental d’hygiène, appelé à donner un avis. 

La Cour des comptes relève enfin l’insuffisance des contrôles diligentés à l’égard des installations. Le taux de contrôle des élevages soumis au régime des ICPE est dans tous les départements bretons inférieur à 2,5 %, du moins jusqu’en 2000.

Et ces contrôles, lorsqu’ils ont lieu, mettent en évidence une proportion importante d’élevages en situation irrégulière : ainsi dans les Côtes d’Armor, au 31 décembre 1999, 1055 élevages sur 1482 sont en situation illégale. Le contrôle de la cohérence des plans d’épandage est décrit comme hors d’atteinte, et l’exécution des plans d’épandage échappe aussi, selon les propres termes de la cour des comptes, à tout contrôle. 

►Carence fautive des autorités de l’Etat dans l’application de la réglementation des installations classées agricoles.