...Selon les candidats à la présidentielle.
La loi "littoral" de 1986 est actuellement remise en question par certains élus locaux au nom du développement économique.
Sur ce sujet, pas d'hésitation entre madame Royal et monsieur Sarkozy.
L'une au minimum maintiendra en l'état la loi, tandis que l'autre de toutes façons et sans concerter les associations de défense de l'environnement, l'assouplira.

Dans le dossier spécial présidentielles du numéro du 13 avril dernier, le journal a posé la même question aux différents candidats :
La loi "littoral" doit-elle, selon vous, être renforcée, assouplie, rester en l'état?

S.Royal- Certains élus de droite n’ont de cesse de vouloir démanteler la loi littoral au prétexte d’une trop grande « rigidité ». On ne peut ignorer que derrière cette apparence de bon sens se cachent trop souvent des velléités foncières et spéculatives importantes. Les problèmes de densification des populations doivent être gérés de manière globale et intégrée, prenant en compte non seulement les besoins résidentiels mais aussi l’environnement, le travail et les services publics. L’aménagement du territoire littoral ne doit en aucun cas être laissé aux seules « lois » de la spéculation foncière. Il faut au contraire conserver les outils de régulation publique comme la loi littoral, en créer d’autres comme les établissements publics fonciers, et augmenter les moyens de fonctionnement d’outils comme le Conservatoire du littoral, qui est, en matière de gestion et d’aménagement intégré du territoire, un modèle que beaucoup de pays nous envient.

N. Sarkozy - La loi « littoral » a largement démontré son utilité depuis 20 ans. Elle mérite cependant d’être mise à jour, sans pour autant que l’économie générale du dispositif soit bouleversée. Je crois qu’il faut à la fois la renforcer pour mieux lutter contre les cas de détournement qui ont été constatés, et l’assouplir pour ne pas entraver le développement normal des communes, tout en conservant l’objectif général de protection de l’environnement. En tout état de cause, cette actualisation doit intervenir en pleine concertation entre l’État et les collectivités locales.

Il est aussi intéressant de rapporter ici les avis des autres candidats éliminés au soir du 22 avril dernier.

D. Voynet - Contrairement à ce que pensent certains élus locaux à courte vue, la qualité du littoral est la principale richesse économique des communes côtières. La loi « littoral » doit être appliquée, dans sa totalité. Il est donc nécessaire, dans un premier temps, de réintroduire dans le champ de la loi les rias et étiers, qui en ont été sortis par un article de la loi sur la ruralité. Par ailleurs, tous les moyens réglementaires doivent être utilisés pour éviter que des élus locaux signent, parfois de bonne foi, des permis de construire litigieux.

F. Bayrou - La loi « littoral » doit rester en l’état, en faisant observer qu’un certain nombre de points faisant l’objet de jurisprudences hésitantes doivent être précisés pour donner plus de sécurité juridique aux communes.

O.Besancenot- La loi littoral a été instituée au bénéfice de la conservation des espaces naturels côtiers, pour la protection de nos paysages et le maintien dans le giron public des territoires à proximité directe de l’océan. Cette loi devait permettre de contenir l’urbanisation dans des territoires essentiels pour la protection de la biodiversité, territoires soumis à une forte pression touristique et industrielle, de même que garantir le droit à toutes et tous d’un accès libre et gratuit aux plages, et aux bords de mer en général. Bien évidemment, cette loi est venue contrecarrer les intérêts particuliers des promoteurs immobiliers et des industriels, interdisant par exemple toute construction à moins de 100 mètres du rivage. Dès lors, tous les moyens auront été bons pour la contourner, avec la complicité des pouvoirs politiques locaux qui appuient les projets d’aménagement des promoteurs, et celle des préfectures qui ferment les yeux sur leur illégalité. Si ça n’était aussi grave, on pourrait rire de l’arlésienne d’un décret d’application de la loi pour les estuaires fixant la liste des communes où la loi doit s’appliquer et qui n’aura pas été publié en plus de 20 ans d’attente… Les estuaires sont des réserves de première importance pour la biodiversité, mais malheureusement aussi des zones stratégiques pour le profit des lobbies de l’énergie et de l’industrie, pétroliers et nucléairocrates en tête ! Nous demeurons bien évidemment hostiles à la remise en cause de la loi littoral. Nous souhaitons même son renforcement, avec en premier lieu un contrôle accru de son application par des structures indépendantes et des sanctions exemplaires pour les infractions constatées. Nous sommes également partisans d’une politique volontariste et progressiste qui aille au-delà de la loi actuelle, avec dans un premier temps l’extension territoriale de son emprise. Il serait également salutaire d’augmenter considérablement les moyens du Conservatoire du littoral, afin qu’il puisse se doter d’équipes gestionnaires capables de mener une politique de gestion des milieux indépendante des pressions et des lobbies, et dépasse le cadre de ses fonctions actuelles se limitant à la question de la maîtrise foncière.

M.-G. Buffet - La loi littoral a joué un rôle fondamental dans la préservation de l’environnement et la qualité des paysages. Il était essentiel que le législateur prenne ses responsabilités pour lutter contre un urbanisme anarchique au regard de la forte pression foncière que connaissent ces espaces. Cet effort doit être renforcé et poursuivi pour éviter que cette législation soit au fil du temps vidée de son contenu.

J.-M. Le Pen - La loi du 3 janvier 1986, dite « loi littoral a certainement permis d’éviter l’urbanisation sauvage des 5 500 kilomètres de littoral français, comme cela s’est fait dans certaines régions d’Espagne ou du Portugal. Cependant cette loi était peut-être trop ambitieuse. D’une part, elle prétendait concilier une politique d’ordre national, la protection des côtes françaises, avec les compétences données dans le cadre de la décentralisation aux communes en matière d’urbanisme. D’autre part, elle était destinée à régir des littoraux très divers. Le littoral varois, archi urbanisé, est ainsi fort différent de celui de la Manche. L’application stricte de son article 3 peut menacer les activités traditionnelles, (la pêche, l’agriculture, la conchyliculture, l’industrie navale...), de certaines régions littorales. Sans réformer de fond en comble la « loi littoral », il faut y apporter des aménagements tenant compte notamment de la diversité naturelle et humaine des littoraux français, de l’autre et améliorer le fonctionnement de la justice et de l’administration, afin de rompre avec l’insécurité juridique.

P. de Villiers - La loi doit rester en état et être accompagnée d’initiatives locales telles les « contrats environnement littoraux » mis en place en Vendée.